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Un monde dans une perpétuelle crise

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criseUn an à peine après mon auguste naissance, la France célébrait déjà mon premier anniversaire en se balançant des parpaings à la figure, Cohn-Bendit commençait à emmerder tout son monde, et le Général confiait à Tata Yvonne, dépité, que la France partait en couilles.

Cinq ans plus tard, les pays arabes, toujours pas remis de leur mémorable raclée enregistrée lors de la guerre des six jours, s’essayaient à une nouvelle expédition en terre promise ; encore ratée.

Suite à cette déconvenue, les prix de l’or noir flambaient, les trente glorieuses tiraient définitivement leur révérence, la France commençait à tirer la langue, les chômeurs déboulaient dans les agences pour l’emploi ; c’était le début de la crise.


Elle ne devait être que passagère, elle n’a jamais cessé.

J’ai parfois l’impression que ce vocable de  ”crise” a bercé toute mon adolescence et depuis n’a jamais cessé de murmurer son lancinant refrain à mes oreilles fatiguées.

C’est la crise mon petit.

C’est la crise jeune homme.

C’est la crise mon vieux.

Afin de l’éviter, on (la société, mes parents, le président de la république) m’à forcé à passer un bac C (heureusement raté) au prétexte que c’était le seul moyen de ne pas mourir de faim demain.

Le malheureux qui choisissait une voie autre était considéré soit comme un branleur de littéraire de mes deux aux tendances vaguement psychopathes, soit un kamikaze enragé condamné à errer dans les travées de l’ANPE et le plus souvent un peu des deux.

Sur quoi, histoire d’égayer le tableau et d’éviter à la morosité de s’installer, le SIDA a joyeusement déboulé, mettant fin au mythe de la libération sexuelle, et du jour au lendemain, c’est devenu l’enfer sur terre.

On ne pouvait même plus baiser pour oublier qu’on allait tous rater nos vies et finir dans le ravin.

Les années passant, tout est allé de mal à pis.

La gauche a succédé à la droite, la droite à la gauche, on a même mélangé les deux juste pour voir mais sans effet : la crise perdurait.

Puis, du haut de ses montagnes, Ben Laden a commencé à s’ennuyer et s’est amusé à jouer au jokari avec les tours jumelles.

L’Amérique n’a pas apprécié la plaisanterie et a convoqué le fantôme de Lawrence d’Arabie pour s’en aller inspecter les sables irakiens puis les collines afghanes.

Le monde n’a pas aimé. La crise a adoré.

En 2008, on s’est aperçu qu’on avait vendu des maisons à des gens pauvres comme Job et les banques ont commencé à claquer des dents avant de passer sous la guillotine, décapitant le peu d’espoir qui nous restait.

La grande crise du capitalisme, a-t-on dit, à qui on allait une bonne fois pour toutes régler son compte, afin que les générations futures puissent continuer à prospérer au lieu de nous maudire pour les avoir contraint à chasser le bison dans le but de remplir le ventre de leurs enfants crevant de faim.

A l’heure d’aujourd’hui, nous sommes toujours en crise.

Aux dernières nouvelles, le chômage se porte comme un charme, les usines agonisent, le niveau des océans augmente, la planète se réchauffe, on caille de chaleur, le pouvoir d’achat est encalminé dans la bande d’arrêt d’urgence de la récession, la croissance décroît, l’horizon s’assombrit, la fin se rapproche.

Pourtant nous sommes toujours vivants et plutôt bien portants.

Pour la plupart d’entre nous, vivant dans le monde occidental, nous mangeons à notre faim.

Nous ne nous levons pas tous les matins en craignant de trouver dans notre boîte aux lettres une convocation pour rejoindre notre corps d’armes afin de participer à une nouvelle Grande Guerre à l’ouest de l’Oural.

Nos lits sont douillets, nos écrans de télévision, plats, nos téléphones, portables, nos cuisines, équipées, nos tables, basses, nos enfants, obèses, nos vacances, nombreuses.

Nos radiateurs ronronnent en hiver, nous sommes libres d’aller où bon nous semble, nous pouvons même exprimer à voix haute notre mécontentement d’être gouvernés par des incapables et, de temps à autre, on nous demande même de choisir ceux qui présideront à notre destinée.

Et pourtant, nous sommes bel et bien en crise puisque tout le monde nous assène que nous le sommes.

J’ignore si le paradis a jamais existé sur cette terre mais l’idée que les hommes s’en faisaient à l’origine de l’humanité devait ressembler à ce que nous vivons depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

Pourvu seulement que cette crise perdure à tout jamais…

source : http://blog.slate.fr

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