Il y a 1,127 million d’années, l’Europe subissait un froid intense qui a anéanti les premiers humains
Il y a plus d’un million d’années, les premiers habitants de l’Europe auraient subi un refroidissement climatique intense. Il aurait supprimé toute vie humaine sur le continent, révèle une étude scientifique.
Ont-ils disparu ? Ou bien trouvé leur salut dans la fuite ? Il y a 1,127 million d’années, les premiers habitants de l’Europe ont dû faire face à un brusque refroidissement du climat qui a rendu toute vie humaine impossible. Cette étonnante découverte, publiée le 10 août 2023 dans Science, a été faite par une équipe de scientifiques internationaux.
Le premier humain à peupler notre continent est notre ancêtre Homo erectus, qui s’est installé en Espagne il y a 1,2 à 1,4 million d’années. Les températures moyennes étaient alors semblables à celles que l’on connaît aujourd’hui, avec des précipitations plus abondantes. D’après les restes animaux et végétaux découverts sur les sites fouillés, notre ancêtre vivait au milieu de forêts méditerranéennes et tempérées, en présence de vastes zones humides.
Tout a changé il y a 1,127 million d’années. L’Europe vivait alors la fin d’une de ces périodes de glaciation qui se succèdent environ tous les 100 000 ans. Alors que le climat devait se réchauffer, l’équipe de scientifiques a détecté dans une longue carotte de sédiments prélevée au large du Portugal les signes d’un refroidissement brutal de l’océan. En surface, les eaux ont carrément perdu 7 °C. Pis : les pollens venus de la terre ferme et charriés par les rivières jusqu’à la mer ont aussi trahi un changement de paysage. Le froid a fait disparaître les forêts. Elles ont été remplacées par des steppes semi-désertiques.
Des effets similaires aujourd’hui ?
Un refroidissement aussi rapide ne peut avoir qu’une origine climatique. Dans leur étude, les scientifiques font l’hypothèse que le réchauffement en cours a agi sur les calottes de glace recouvrant l’hémisphère nord. La fonte de ces glaces a alors libéré d’énormes quantités d’eau froide dans l’océan, ce qui aurait affecté le système de courants de l’Atlantique nord. Premier concerné : un puissant mouvement d’eau nommé « circulation de retournement » (Amoc en anglais) qui transporte les eaux tropicales chaudes le long des côtes européennes et, en réchauffant les vents, y rend les hivers plutôt doux.
Une hypothèse confirmée par une simulation climatique, qui certifie qu’un apport massif d’eau de fonte comme celui qui se serait produit il y a plus d’un million d’années conduirait à un quasi-arrêt de la circulation de retournement. Pendant environ 4 000 ans, les hivers seraient devenus beaucoup plus froids. Une autre simulation, portant sur les ressources disponibles dans de telles conditions, conclut que l’Europe aurait cessé d’offrir à Homo erectus de quoi se nourrir. De fait, cette espèce n’a plus laissé de trace, et la recolonisation du continent n’a repris que bien plus tard, il y a 850 000 ans, avec une autre espèce humaine, Homo antecessor, sans doute plus adaptée aux rudesses du climat européen.
Les Homo sapiens du XXIe siècle risquent-ils de connaître le même sort qu’Homo erectus ? La question vient à l’esprit depuis qu’une étude récente a prédit que la circulation de retournement était menacée de s’interrompre avant 2100. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, un refroidissement serait envisageable.
Interrogé sur le sujet, le responsable des modélisations pour l’étude de Science, Axel Timmermann, est convaincu qu’il n’en sera rien : « Il n’y aura pas de refroidissement par rapport aux conditions actuelles, même dans le cas d’un arrêt futur de l’Amoc. Toutes les simulations des modèles climatiques s’accordent pour prédire que les effets d’un refroidissement des eaux océaniques serait surcompensé par le réchauffement climatique actuel. » D’autres scientifiques n’écartent pas un assèchement de l’Europe en cas d’effondrement de l’Amoc. Le climat de cette dernière pourrait devenir « plus proche de celui que l’on trouve à l’ouest du Canada », suggérait ainsi à Reporterre Florian Sévellec, chargé de recherche au CNRS, avec une multitude de conséquences possibles sur l’humain.
Source : https://reporterre.net/
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