Un énorme impact météoritique il y a 3 milliards d’années pourrait avoir stimulé la vie sur Terre
Les météorites ont plutôt mauvaise réputation. L’impact majeur le plus récent sur notre planète a été assez dévastateur, et a fait disparaître les trois quarts de toutes les espèces animales de la planète.
Mais un impacteur beaucoup plus grand, il y a bien longtemps, pourrait avoir eu l’effet inverse.
Il y a quelque 3,26 milliards d’années, un rocher géant d’une taille 50 à 200 fois supérieure à celle du dinosaure de Chicxulub s’est écrasé sur notre planète. Selon une équipe dirigée par la géologue Nadja Drabon, de l’université de Harvard, les bouleversements provoqués par cet impact colossal et stupéfiant ont dû entraîner des nutriments qui ont donné un coup de pouce à quelques microbes primitifs triés sur le volet.
Cape Cod dans le Massachussetts – crédit wikipedia
« Imaginez-vous au large de la côte de Cape Cod dans le Massachussetts, sur une plate-forme d’eau peu profonde », explique Mme Drabon. « C’est un environnement à faible énergie, sans courants forts. Et tout à coup, vous avez un tsunami géant qui déferle et déchire le fond de la mer ».
Nous ne savons pas, de première main, ce que l’impact d’une météorite géante fait à notre planète. C’est une bonne chose, dans l’ensemble. Mais nous sommes en mesure de modéliser et de simuler ce qui se passe, en reconstituant les événements sur la base des dépôts de minéraux dans les archives géologiques.

Couches rocheuses de la ceinture de roches vertes de Barberton étudiées par l’équipe. (Drabon et al., PNAS, 2024)
Une formation connue sous le nom de Barberton Greenstone Belt en Afrique du Sud contient des preuves d’un impact géant qui a secoué la Terre il y a 3,26 milliards d’années, un événement connu sous le nom de S2. Mme Drabon et ses collègues ont procédé à une caractérisation minutieuse des minéraux de la couche rocheuse S2 et ont reconstitué la séquence des événements qui ont suivi.
Il n’en reste pas moins que l’événement aurait été assez dévastateur. La chaleur de la collision aurait fait bouillir la couche supérieure de l’océan, tandis que l’impact lui-même aurait projeté des poussières et des débris dans l’atmosphère, créant un épais brouillard qui aurait bloqué la lumière du soleil et gêné les microbes photosynthétiques vivant dans les eaux peu profondes.
Il y aurait également eu un énorme tsunami qui aurait dragué le fond de l’océan, faisant remonter à la surface des matériaux habituellement séquestrés dans les profondeurs.
Bien que cela ait nui à de nombreuses formes de vie naissantes qui s’efforçaient de survivre depuis quelques centaines de millions d’années seulement, cela a été une aubaine pour certaines d’entre elles.
La météorite elle-même aurait délivré une grande quantité de phosphore, par exemple, tandis que les eaux extraites du fond marin auraient été riches en fer. Ces deux éléments auraient nourri tous les microbes capables de les métaboliser, provoquant un pic bref mais significatif de leur nombre avant que la Terre ne retrouve une existence plus stable. Cela aurait été particulièrement vrai pour les proliférations microbiennes métabolisant le fer dans les eaux peu profondes.
« Nous pensons que les impacts sont désastreux pour la vie, mais cette étude met en évidence le fait que ces impacts auraient eu des effets bénéfiques sur la vie, en particulier au début », explique M. Drabon. « Ces impacts auraient en fait permis à la vie de se développer.

Diagramme détaillant les changements provoqués par l’impact de la météorite S2. (Drabon et al., PNAS, 2024)
Il faudra attendre plus de 2,5 milliards d’années avant que les organismes multicellulaires n’apparaissent, introduisant à leur tour des changements significatifs dans la biosphère terrestre. Les dinosaures ne sont apparus qu’il y a environ 250 millions d’années, et ont régné jusqu’à ce que la météorite de Chicxulub déclenche l’extinction du Crétacé et du Paléogène, il y a 66 millions d’années.
Même cet impact dévastateur – la seule météorite que nous ayons pu relier avec certitude à un événement d’extinction – a ouvert de nouvelles voies à la vie. Avec le déclin des dinosaures non aviaires, les mammifères ont occupé les niches écologiques laissées vacantes ; sans cette dévastation, il est possible que l’humanité n’ait jamais vu le jour.
Ainsi, s’il est vrai qu’un impact massif de météorite a des effets délétères importants sur certains organismes, il peut aussi avoir des effets bénéfiques inattendus sur d’autres. En fait, il est tout à fait possible que des impacts précoces répétés aient modifié la Terre de manière à la préparer aux explosions évolutives qui allaient suivre.
« Nos travaux suggèrent qu’à l’échelle mondiale, les premières formes de vie ont pu bénéficier d’un afflux de nutriments et de donneurs d’électrons, ainsi que de nouveaux environnements, à la suite d’impacts majeurs », écrivent les chercheurs.
Ils prévoient d’étudier plus avant la ceinture de roches vertes de Barberton pour tenter de reconstituer cette période mystérieuse, mais peut-être cruciale, de l’histoire de la vie sur Terre.
La recherche a été publiée dans les Proceedings of the National Academy of Sciences.
Adaptation Terra Projects
Source : https://www.sciencealert.com/
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