Pourquoi l’Atlantique Nord bat-il des records de chaleur ?

Certains endroits affichent près de 4 degrés Celsius de plus que la normale à cette époque de l’année. Ces dernières semaines, les températures de surface de la mer dans certaines parties de l’océan Atlantique Nord ont atteint des niveaux record.
Ce réchauffement anormal se produit dans une large bande qui s’étend sur près d’un tiers de l’Atlantique vers l’ouest, à partir de la côte nord-ouest de l’Afrique. Les données satellitaires révèlent que certaines eaux de surface de la région sont supérieures de près de 4 degrés Celsius (environ 7 degrés Fahrenheit) à la normale pour cette période de l’année, explique Brian McNoldy, météorologue à l’université de Miami à Coral Gables (Floride).
« Depuis le mois de mars, la chaleur a atteint un niveau record, mais c’est encore plus vrai aujourd’hui », explique-t-il.
Le 10 juin, par exemple, la température moyenne à la surface de la mer pour la partie de l’Atlantique qui s’étend de l’équateur à 60 degrés nord – jusqu’au sud de la Norvège, au sud du Groenland et aux parties centrales de la baie d’Hudson au Canada – était de 22,7° C (près de 73° F). C’est environ 1 degré C de plus que la moyenne enregistrée entre 1991 et 2020, note M. McNoldy. Le précédent record à la même date, 22,1° C, remonte à 2010.
Les températures de surface de la mer dans l’Atlantique Nord en 2023 (rouge) battent des records quotidiens depuis le mois de mars. Sur ce graphique, les températures moyennes quotidiennes de 1982 à 2022 ont été soustraites des températures de cette année ainsi que de celles de 1982 à 2022 (en gris).
Selon des scientifiques, les eaux plus chaudes que la normale cette année pourraient contribuer à renforcer les tempêtes qui se forment dans l’Atlantique Est et qui finissent par engendrer des ouragans.
Les causes de ce réchauffement inhabituel ne sont pas claires. Mais voici un aperçu de plusieurs facteurs qui pourraient être en jeu.
Une pénurie de poussière du Sahara
De temps à autre, de vastes étendues de poussière du Sahara traversent l’océan. Elles sont transportées par les vents soulevés par un anticyclone semi-permanent appelé « anticyclone des Açores » en raison de sa proximité avec ces îles.
Mais dernièrement, l’anticyclone des Açores s’est affaibli et s’est déplacé vers le sud-ouest en s’éloignant de l’Afrique. Selon Michael Mann, climatologue à l’université de Pennsylvanie, les vents qui transportent habituellement les poussières sahariennes vers l’ouest au-dessus de l’Atlantique Nord sont plus calmes et largement dépourvus de poussières.
Par conséquent, le rayonnement solaire qui serait normalement dispersé dans l’espace par la poussière atteint la surface de l’océan, réchauffant les eaux sombres (SN : 9/25/01).
Si et quand les alizés se renforcent, l’augmentation de la poussière en provenance d’Afrique pourrait contribuer à refroidir quelque peu la région.
Diminution de la pollution atmosphérique
En 2020, de nouvelles règles en matière d’émissions sont entrées en vigueur pour les porte-conteneurs long-courriers qui rejettent des gaz riches en sulfates. Selon certaines hypothèses, une diminution de la pollution pourrait entraîner une augmentation du réchauffement. Moins de panaches dispersent la lumière du soleil dans l’espace, plus de rayonnement parvient à la surface de la mer.
Mais certaines études suggèrent que l’effet refroidissant des panaches de navires pourrait avoir été mineur au départ : Non seulement les gaz d’échappement ont une courte durée de vie, mais les polluants peuvent provoquer une évaporation plus rapide des nuages naturels, ce qui entraîne un réchauffement et non un refroidissement (SN : 2/1/21).
Tendances du réchauffement climatique
Cette année marque le retour d’El Niño, un phénomène climatique qui se caractérise par des températures de surface de la mer supérieures à la normale le long de l’équateur, à l’ouest de l’Amérique du Sud. D’ici à l’hiver, il y a plus de quatre chances sur cinq que le phénomène El Niño soit fort ou modéré, selon les scientifiques du Centre de prévision du climat de l’Administration nationale des océans et de l’atmosphère.
El Niño update: should the current trajectory continue, the 2023 event may end up among the strongest on record.
As of June 11th, the central equatorial Pacific Ocean was more unusually warm than both June 1997 + 1982 and on par with June 2015.
While the average outcome of El… pic.twitter.com/IrU4HHLi2T
— Ben Noll (@BenNollWeather) June 13, 2023
Chaque El Niño a sa propre personnalité (SN : 5/2/16). Mais en général, El Niño augmente les températures moyennes à la surface des terres et des mers dans le monde entier, explique M. Mann. Le changement climatique d’origine humaine a eu le même effet, note-t-il.
Mais il y a encore beaucoup d’incertitudes sur la façon dont les conditions actuelles peuvent affecter les prévisions à venir.
Les eaux exceptionnellement chaudes de l’Atlantique Nord peuvent avoir tendance à renforcer les systèmes de tempête qui se transforment ensuite en dépressions tropicales, puis en ouragans. Mais le phénomène El Niño qui se développe actuellement dans le Pacifique équatorial pourrait entraver leur formation en renforçant les vents dans la haute atmosphère qui peuvent cisailler les sommets des ouragans naissants. Selon les scientifiques, l’activité de la saison des ouragans de cette année dépendra de l’une ou l’autre de ces forces (SN : 5/26/23).
Adaptation Terra Projects
Source : https://www.sciencenews.org/
(309)
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.