Des exoplanètes plus habitables que la Terre
Des exoplanètes deux à trois fois plus massives que la Terre pourraient se révéler plus adaptées à l’apparition de la vie que notre planète. Dans cette hypothèse, deux astronomes proposent d’étudier avec la plus grande attention le système planétaire qui semble entourer l’une des étoiles les plus proches du Soleil, Alpha Centauri B, pour y chercher des mondes « super habitables. »
« Pour être habitable, un monde (planète ou lune) n’a pas besoin de se situer dans la zone d’habitabilité d’une étoile. De même, un monde circulant dans cette zone d’habitabilité n’est pas nécessairement habitable. » Voilà comment René Heller (McMaster University, Hamilton, Ontario, Canada) et John Armstrong (Weber State University, Ogden, Utah, États-Unis) introduisent l’article intellectuellement stimulant qu’ils viennent de publier (revue Astrobiology) et dans lequel ils développent leur concept de « mondes super habitables. »
La notion de zone d’habitabilité existe depuis des décennies en astronomie. Il s’agit de la région qui, autour d’une étoile donnée, permet l’existence d’eau sous forme liquide à la surface d’une planète ou d’une lune, l’eau étant considérée comme l’élément primordial pour le développement des formes de vie que nous connaissons sur la Terre. En simplifiant, il s’agit d’une zone annulaire entourant chaque étoile au sein de laquelle des planètes de type terrestres, des planètes telluriques avec une croûte solide et une atmosphère, pourraient connaître durant une période suffisamment longue (plusieurs milliards d’années) des conditions potentiellement favorables à l’apparition et au développement de la vie.
Deux remarques s’imposent immédiatement. D’une part, la notion de zone d’habitabilité est intrinsèquement liée à notre compréhension de l’apparition de la vie sur notre planète qui, jusqu’à preuve du contraire, est notre seul exemple de monde habitable et habité. Si nous devions découvrir un jour que la vie peut apparaître et se développer durablement dans des milieux radicalement différents de celui ou de ceux que nous connaissons sur Terre cela bouleverserait profondément cette notion. D’autre part, la définition de la zone d’habitabilité s’est prodigieusement complexifiée au fil des années pour tenir compte d’une quantité croissante de facteurs physiques, chimiques ou astronomiques, si bien que l’idée même d’une zone d’habitabilité unique dans un système planétaire perd peu à peu de sa pertinence. La découverte de conditions qui pourraient être favorables à l’apparition de la vie sur des lunes comme Europe (Jupiter) ou Titan (Saturne), qui sont situées largement en dehors de la zone d’habitabilité théorique du Système solaire, renforce ce point.
D’où les précisions de René Heller et de John Armstrong qui considèrent qu’il y a trop souvent une confusion entre zone d’habitabilité et planète habitable, et que les recherches d’exoplanètes habitables se basent aujourd’hui beaucoup trop, sinon exclusivement, sur des caractéristiques terrestres. À leur avis, le concept de monde habitable devrait être considérablement élargi, mieux, ils suggèrent que certains mondes seraient bien plus habitables que la Terre et qu’il faudrait donc étendre nos critères de recherches en conséquence. Faire preuve de plus d’imagination en quelque sorte.
Ils exposent ainsi point par point les éléments qui peuvent jouer un rôle dans l’apparition et le maintien des conditions nécessaires au développement d’organismes unicellulaires puis multicellulaires de plus en plus complexes, et leurs conclusions ouvrent des perspectives très intéressantes. René Heller et John Armstrong estiment que des exoplanètes telluriques 2 à 3 fois plus massives que la Terre seraient potentiellement plus habitables. Ces « superterres » bénéficieraient d’une période d’activité tectonique plus longue, ce qui est indispensable pour réguler le taux de dioxyde de carbone présent dans l’atmosphère et donc l’effet de serre que celui-ci engendre (en l’absence de toute intervention humaine). Elles auraient un champ magnétique plus intense assurant une bonne protection contre les rayonnements cosmiques et stellaires très énergétiques, une capacité à conserver longtemps une atmosphère un peu plus épaisse et une plus grande superficie de terres émergées et de mers. Sur ce point, les auteurs suggèrent que les planètes avec de nombreux petits continents dispersés dans des océans seraient probablement plus habitables que celles qui arborent seulement un ou deux supercontinents.
Ils relèvent qu’une température de surface légèrement supérieure à celle de la Terre serait probablement bénéfique, et soulignent que l’existence de plusieurs mondes habitables dans un même système planétaire pourrait accroître l’habitabilité de chacun grâce aux échanges de matières provoqués par les impacts cométaires et météoritiques. Enfin, ils précisent que plus un monde habitable est âgé, plus la probabilité qu’il soit habité croît, et que, plus il est habité, plus son habitabilité et sa biodiversité augmentent, car les formes de vie modifient progressivement l’environnement à leur avantage. Pour éviter une dérive des commentaires vers un sujet bien contemporain, les auteurs rappellent que ce dernier point concerne les modifications apportées en douceur sur des centaines de millions d’années par des formes de vie simples et non intelligentes et non pas brutalement sur un très bref laps de temps par une espèce industrieuse…
Même si la vie est apparue rapidement sur notre planète, en quelques centaines de millions d’années, une maturation de plusieurs milliards d’années semble avoir été nécessaire pour voir émerger des espèces intelligentes. Cette notion de durée permet de sélectionner les étoiles autour desquelles la probabilité de détecter des planètes habitables, voire habitées, serait la plus grande. Les recherches autour d’étoiles dont la luminosité reste stable durant des milliards d’années, celles de type spectral G, K ou M (le Soleil est de type spectral G), devraient ainsi être privilégiées.
source : http://autourduciel.blog.lemonde.fr/
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