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Conflit en Ukraine : fortes inquiétudes en matière de contamination radioactive à Tchernobyl

tank russe le 24 févrer 2022, credit Konstantin Mihalchevskiy / Spunik / AFP

Le 24 février en fin d’après-midi, heure française, la nouvelle tombait et faisait un peu plus pénétrer la guerre en Ukraine dans le royaume très malaisant d’une catastrophe surréaliste.

Après quelques heures d’un combat semble-t-il acharné, jeudi 24 février 2022, et comme prophétisé par certains observateurs il y a quelques semaines, les forces russes se sont emparées de Tchernobyl et de la zone d’exclusion radioactive qui l’environne.

Le constat

Aucun des 4 réacteurs n’est en fonctionnement (le dernier a été arrêté en 2000) mais la zone comporte de nombreuses installations à risque (entreposages de combustibles irradiés, sarcophage du réacteur n°4, désormais recouvert d’une arche qui n’est certes pas conçue pour résister à des obus), installation de traitement de déchets radioactifs et multiples entreposages de déchets radioactifs pour la plupart non sécurisés (un grand nombre étant enfouis en vrac dans des fosses simplement recouvertes d’une couche de terre). L’un des termes sources les plus préoccupants est l’entreposage en piscine des assemblages de combustibles irradiés déchargés des réacteurs n°1, 2 et 3. Tout doit être fait pour maintenir en
fonctionnement leurs dispositifs de sûreté, ce qui implique que les équipes soient toujours en situation d’assurer les interventions.

Depuis la fin de journée du 24 février, un certain nombre de capteurs de mesure du taux de radiation gamma ambiant situés à proximité de la centrale de Tchernobyl et exploités par l’agence d’État Ukrainienne DAZV, qui gère la zone d’exclusion de Tchernobyl, ont enregistré une forte augmentation du niveau de radiation (multiplication par 20, 30 voire près de 40 selon les points), dans toutes les directions (nord, sud, ouest ou est de la zone) et jusqu’à une trentaine de km de distance, voire plus. D’autres capteurs, en revanche, ne montrent aucune augmentation. Le 24/02 matin, les vents soufflaient plutôt en direction de l’est-sud/est le matin avant de s’orienter du sud vers le nord dans l’après-midi.

Des recherches complémentaires doivent être conduites pour interpréter ces données. Si les débits de dose enregistrés correspondent à des valeurs réelles (par exemple passage d’environ 3 µSv/h à 65,5 µSv/h en quelques heures), la situation est extrêmement préoccupante. D’autant plus que l’on peut logiquement craindre que l’augmentation du rayonnement ambiant (risques d’irradiation externe) s’accompagne de la contamination de l’air, et donc de risques d’inhalation pour les militaires et les civils présents. Cependant, on ne peut exclure l’impact de perturbations électromagnétiques, voire d’une cyberattaque. Le laboratoire de la CRIIRAD s’efforce actuellement de vérifier et recouper les informations. Il suit également l’évolution de la pollution potentielle. Les vents soufflent actuellement en direction du nord et devraient tourner légèrement en direction du nord-nord/est dans l’après-midi.

Les faits

L’inquiétude concerne également la sécurité des 15 réacteurs des 4 centrales nucléaires de Khmelnitski, Konstantinovka, Rovno et Zaporijjia. Évidemment, il est raisonnable de penser qu’elles ne constituent pas des objectifs militaires mais des situations de conflits sont toujours des situations à haut risque (on se rappelle le crash du vol de Malaysia Airlines, abattu par un tir de missile en 2014). Il est possible de diminuer le risque potentiel en arrêtant les réacteurs mais en matière d’électricité, l’Ukraine dépend à plus de 50% du nucléaire.

Cette capture, qui laisse le sarcophage contenant la catastrophe de 1986 dans un état encore inconnu, s’accompagnerait d’une prise d’otages du personnel de la centrale et des installations environnantes, faisant fulminer Washington.

Mais le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, n’hésitait pas à parler d’une déclaration de guerre à l’Europe toute entière, elle aussi prise en otage par cette capture russe d’un lieux qui n’est pas seulement le symbole éteint des dangers du nucléaire, mais qui reste le lieux de dangers actifs et indicibles pour le continent dans son ensemble.

«Si le dépôt était détruit par des frappes d’artillerie de l’adversaire, la poussière radioactive recouvrirait l’Ukraine, le Bélarus et les pays de l’UE», mais comme le relate Motherboard, ces craintes n’ont rien d’une dramatisation de la situation par les autorités ukrainiennes destinée à pousser la communauté internationale à réagir. Elles sont largement partagées par certains experts, et vont bien au-delà du cimetière nucléaire de Tchernobyl.

Sources : http://balises.criirad.org/ / https://korii.slate.fr/

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