Science&Vie et Gulf Stream : pas de glaciation en vue!
Un article paru dans Science&Vie remet en cause l’arrêt possible à court terme du Gulf Stream… tout en maintenant la porte ouverte sur le long terme (on sait jamais 😉 ). En voici les axes principaux :
Dans les médias, l’hypothèse est largement répandue que « le réchauffement climatique aurait pour effet de plonger [l’Europe] dans un nouvel âge… glaciaire. […] Ce ne serait pas la première fois : il y a 12500 ans […] les températures chutèrent de 5° en quelques décennies.» En décembre 2005, Harry Bryden annonce une baisse de l’intensité de la circulation océanique de 30% entre les années ’50 et 2004.
Le réchauffement aux hautes latitudes dans l’hémisphère Nord amènerait une élévation de la T° de surface des océans, une augmentation des précipitations et de l’apport d’eau douce des rivières et de la fonte des glaces. Des eaux de surface moins salées et plus chaudes auront plus de difficultés à plonger. La circulation thermohaline en serait ralentie et pourrait même s’arrêter.
« En 2005 les travaux d’Harry Bryden ont fait croire que nous y étions déjà ! Mais, dès leur sortie, ses conclusions ont suscité bien des réserves. » Gavin Schmidt, climatologue de la NASA, dit qu’un « ralentissement spectaculaire aurait dû s’accompagner d’une baisse sensible et mesurable des t° sur l’Europe. Sauf que les années 2000 battent les unes après les autres les records de chaleur.» Cet automne, Bryden aurait présenté des données infirmant ses conclusions initiales. Les capteurs installés entre la Floride et les côtes africaines montrent que le Gulf Stream présente une variabilité naturelle du même ordre (données recueillies en 2004-2005).
Bogi Hansen océanographe dans les îles Féroé pensait avoir, lui aussi, mesuré un essoufflement du GS. « En 2001 il annonçait qu’une des branches d’eau froide composant le courant de fond de retour avait ralenti de 20% entre 1950 et 2001 !». Depuis, il a remis en cause sa précédente conclusion. « Les mesures directes montrent clairement qu’il n’y a pas eu de ralentissement dans ce courant de fond sur la période 1995-2005 »
Exit donc le caractère sacré des mesures !
Quant à la fonte des glaces, les dernières modélisations d’un chercheur du CEA montreraient qu’elle pourrait provoquer une diminution de la circulation thermohaline de 50% à l’horizon 2100… et peut-être l’arrêt total vers 2200. Si c’était le cas, L’Europe perdrait 2 à 4° – le réchauffement aurait dans le même temps généré une augmentation de 2 à 5°.
Stephan Rahmstorf, océanographe de l’université de Postdam, dit que si les niveaux de CO2 augmentent trop rapidement, le blocage pourrait avoir lieu plus tôt « disons vers 2050 ». Cependant l’avènement d’un âge glaciaire (càd t° insuffisantes en été pour faire fondre la neige tombée en hiver) n’est pas envisageable.
L’arrêt du GS ferait monter le niveau des mers de 50 cm sur nos côtes et diminuerait l’absorption du CO2 par l’océan, un affaiblissement des moussons en Inde, 50% des précipitations en moins sur l’Amérique du Sud, un agrandissement du Sahara…
Commentaire : Quel pied ! Enfin, on peut dormir sur nos deux oreilles ! C’est tellement confortable d’annoncer une bonne nouvelle. L’article présente cependant des zones d’ombre : les lieux et durées des mesures semblent peu cohérents (des données datant de 2005 en infirment d’autres largement antérieures). La diminution des cheminées sous l’Odden, observée la Peter Wadhams, n’est même pas évoquée. L’article laisse une possibilité d’arrêt en 2050, mais s’empresse d’en minimiser et d’en éloigner (Inde, Amérique du Sud) les conséquences. Les conclusions dérangeantes des années précédentes sont infirmées par les mêmes scientifiques qui les avaient énoncées – scientifiques qui s’empressent d’annoncer que, cette fois, ils voient « juste »… En rentrant dans l’orthodoxie du GIEC (et d’autres), nos chercheurs semblent revenir à plus de raison – ils en deviendraient plus « fréquentables » ?
Personnellement, ce papier ne m’a pas du tout convaincu. D’autant qu’il semble très difficile de distinguer les effets actuels du réchauffement de ceux d’une diminution de la circulation thermohaline. Encore une fois, il s’agit de projections, de conjectures par définition incertaines et imprécises. Je soupçonne même un léger parti pris dans la composition de l’article : les titres, les légendes des images font la part belle à la négation du problème du Gulf Stream. A suivre !
Référence de l’article : Science & vie > février 2007 pp. 64 à 69
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