Dernières Infos

Un Monde sans pétrole

Avec un baril qui flambe, certains annoncent un baril à 100$ dans 2 ans et à 300$ dans 10 ans. Attention mesdames et messieurs, nous voilà enfin entrés dans une nouvelle époque : celle d’un monde sans pétrole.

La qualité première du pétrole n’est pas, contrairement à ce que l’on croit, d’entretenir le vrombissement des grosses cylindrées américaines, mais de forcer, de temps en temps, le monde à réfléchir sur lui-même.

Serions-nous dans un monde idéal que l’assèchement des puits de pétrole serait franchement une bonne nouvelle. Le monde songerait à se réorganiser en économisant ses sources d’énergie et en prévoyant des carburants de rechange, moins polluants. On pourrait entrevoir la fin de l’effet de serre qui condamne la planète à de brusques et désastreux changements de climat. Mais ce n’est pas exactement ce chemin que nous empruntons. Car le pétrole n’est pas seulement une source d’énergie ­ une valeur d’usage ­, c’est plus encore une valeur d’échange. Sur lui repose toute l’économie mondiale. Les pétromonarchies n’existent que par lui. Et sans lui, MM. Bush et Cheney ne seraient plus grand-chose. Sans jeu de mots climatique, les firmes pétrolières font la pluie et le beau temps dans nos économies, font et défont les régimes post-coloniaux, et accessoirement, financent les partis politiques. Contrairement à une idée très à la mode, elles sont cause de guerres au moins autant que le fanatisme religieux. Si le capitalisme ne s’imagine pas sans pétrole, ce n’est pas par incapacité, c’est par refoulement, et refus de voir plus loin. Malheureusement, cette imprévoyance volontaire est lourde de catastrophes. La fin de l’or noir engendrera d’abord une crise économique sans précédent dont les pays du Sud et les petites gens seront les principales victimes. Les nababs du pétrole, féodaux arabes ou magnats occidentaux, auront encore quelques belles réserves (en dollars) devant eux.

Un homme, le député Vert Yves Cochet, reprenant le flambeau de René Dumont, tente ces jours-ci d’alerter l’opinion. Dans une récente tribune publiée par Le Monde, il invitait à une « mobilisation générale de nos sociétés » (1). « Si nous voulons maintenir un peu d’humanité à la vie sur terre dans les années 2010, poursuivait-il, nous devons […] appeler les Nations unies à convenir aujourd’hui d’un accord fondé sur les objectifs de garantie, pour les plus pauvres, d’importer encore un peu de pétrole ; d’interdiction de tirer profit de la pénurie pétrolière ; d’incitation aux économies d’énergie ; de stimulation des énergies renouvelables. » Très vaste programme ! Imagine-t-on Dick Cheney s’interdire « de tirer profit de la pénurie » ? Et pourtant, faute de réunir ces conditions, c’est le marché qui se chargera du rationnement, et du partage des richesses. On sait ce que cela veut dire. En attendant, plutôt que d’organiser l’avenir d’une humanité sans pétrole, les puissants de ce monde préfèrent contrôler directement les pays producteurs. Ils ont pour cela deux stratégies. Ou bien ils mettent directement et brutalement la main sur les réserves pétrolifères ­ et cela donne la guerre d’Irak ­, ou bien ils tentent d’amadouer le potentat local ­ et cela donne la visite de Tony Blair au colonel Kadhafi. La deuxième stratégie est certes plus aimable. Mais elle n’est pas plus prévoyante. Alors, quoi pour remplacer le pétrole dans dix ou quinze ans ? La réponse d’Yves Cochet est on ne peut plus claire : rien. Le gaz naturel n’y suffira pas. La seule solution est donc un autre mode de vie, un autre rapport à la consommation, un autre partage des richesses. Un autre système économique en quelque sorte. Autrefois, on aurait appelé cela une révolution.

Comme en 1980, la montée des prix pourrait entraîner des économies d’énergie et des substitutions ralentissant la demande, et permettant donc de repousser le déclin des productions. On pourrait alors se trouver en présence d’un « chameau à deux bosses », pour reprendre l’expression de M. Pierre Radanne, ancien président de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Le scénario proposé récemment par l’un des auteurs de ces lignes (Pierre-René Bauquis) avance l’hypothèse d’un triplement ou d’un quadruplement des prix en monnaie réelle, qui atteindraient d’ici dix à quinze ans un niveau d’une centaine de dollars 2003 par baril. Une telle hausse serait nécessaire pour mettre en place des politiques d’économie d’énergie, en particulier dans le secteur du transport automobile, augmenter sans subventions majeures la part des énergies renouvelables, ainsi que la production de carburants de synthèse, relancer les programmes nucléaires et développer la production d’hydrogène à partir d’énergie nucléaire.

Mais d’autres possibilités existent. Les énergies alternatives connues, solaires ou éoliennes, sont prêtes à prendre la place du pétrole pour ce qui concerne l’énergie pure, c’est-à-dire en remplacement de l’électricité pour faire tourner nos réfrigérateurs ou chauffer notre eau. Il y a peu, General Electric, le groupe américain, a acheté les brevets en Californie pour tout ce qui concerne les cellules photovoltaïques, se rendant bien compte qu’il y avait un gisement de profit à exploiter. À cet égard, on doit reconnaître que le travail de communication, en faveur de ce genre d’énergie, effectué par les écologistes porte ses fruits. Dans une stratégie économique libérale, les investissements nécessaires à la production d’électricité d’origine nucléaire ne peuvent être que le fait de l’État. La pression de plus en plus grande de l’électorat opposé à ce mode de fabrication joint au déficit budgétaire chronique laisse la porte ouverte à l’initiative privée vers des énergies « douces ».

Transports, chauffage, industrie, énergie : de nombreux secteurs vont être totalement déstabilisés et la survie de nos modèles économiques va être sérieusement remise en question.
Mais le plus gros des impacts prévisibles va toucher l’industrie pétrochimique et l’un de ces produits les plus connus et utilisés au monde : le Plastique!

Que serait dont un monde sans pétrole, et surtout, sans plastique?

Serait-ce un monde plus propre? On peut le penser dans un premier temps. Mais allons-nous renoncer à nos objets quotidiens ou tenter de continuer à les produire par d’autres moyens avec d’autres matériaux?
On peut envisager de revenir aux emballages en verre pour les aliments liquides et semi-liquides, au papier pour les matières sèches. Ce qui implique de renforcer fortement les industries du verre et du papier, mais aussi de la métallurgie dont on ne peut dire qu’elles sont sans conséquence sur l’environnement (pollution, déforestation… etc.). Pour les plastiques souples, nous pouvons envisager de revenir au caoutchouc, mais combien faudra-t-il de plantation d’hévéa pour compenser? C’est incalculable. L’impact sur la faune et la flore serait terrible.
Et comment monter des circuits intégrés sur un autre support que le plastique? Un autre matériaux aussi malléable, usinable, non conducteur et inerte? Le fait est que la fin du plastique signifie l’abandon de très nombreuses applications, comme l’électronique, omniprésente et donc la mise en œuvre d’industries de substitution très polluantes et prédatrices de l’environnement.

La fin du pétrole, actuellement, signifie à court terme la fin de la civilisation de la technologie et de la consommation.

Ce serait peut-être une très bonne chose pour l’équilibre écologique de notre biosphère, peut-être même pour l’humanité.
Mais à court terme, vu l’absence de planification de la gestion de l’épuisement annoncé d’une ressource stratégique, la fin de la civilisation du pétrole risque de générer un fantastique chaos économique, mais aussi géopolitique. Les grandes puissances en présence, grands Etats, organismes supranationaux, multinationales voraces, conglomérats financiers, tous vont se battre pour détenir ce que l’on appelle en géostratégie le despotisme hydraulique, c’est à dire la maîtrise et le contrôle en amont d’une ressource vitale pour tout le monde. Il s’agit là d’un pouvoir considérable, et il y a fort à parier que la bataille sera âpre et sans concession pour la maîtrise des dernières sources du pétrole, sans considération d’aucune sorte pour l’environnement ou les peuples.

Quand ce moment viendra (quand, et non pas si…), on risque de regretter amèrement l’ère joyeuse du plastique.

Mais l’Humanité saura passer le cap et inventer de nouvelles technologies, ainsi il est fort à parier que le plastique pourra être remplacé. La nano technologie prévoit dore et déjà l’invention de nouveaux matériaux. Le marché de l’écologie est en marche, et le CO2 n’est il pas entré en bourse depuis début 2005 ? Ce nouveau challenge sera une révolution que l’Homme saura passer. Bienvenue dans l’ère de l’écologie car si ce n’était pas le cas, alors nous pourrions rapidement régresser à l’age du Moyen Age. Mais un monde de scientifiques s’ouvrent devant nous et les solutions se profilent.

sources : http://www.politis.fr/article960.html /  (1) Le Monde du 1er avril. Yves Cochet est l’auteur, avec Agnès Sinaï, de Sauver la terre, Fayard, 288 p., 19 euros. / http://www.monde-diplomatique.fr/2005/01/BABUSIAUX/11803 / http://www.federation-anarchiste.org/ml/article.php3?id_article=2356 /http://www.ethologie.info/monolecte/?2005/07/23/116-le-plastique-cest-fantastique

(675)