Signaux sismiques sous les volcans d’Auvergne
Une étude récente montre des signaux sismiques atypiques sous les volcans du Massif central. Ces signaux révèlent la présence de magma en profondeur. Mais cela signifie-t-il pour autant que les volcans d’Auvergne ne sont pas endormis ? Un scientifique qui a participé à l’étude tente d’y répondre.
C’est une étude publiée récemment qui risque de faire grand bruit. L’étude est financée par l’ANR (Agence nationale de la recherche), portée par l’ISTERRE (Institut des sciences de la Terre). Elle a commencé en 2023 et doit s’achever en 2028. Le projet consistait à disposer sur l’ensemble du Massif central un réseau de stations sismiques. Pas moins de 100 sismomètres ont été installés, pour enregistrer les vibrations émises naturellement dans les profondeurs de la Terre. Guillaume Boudoire, professeur des universités en volcanologie du Laboratoire Magmas et Volcans de l’Université Clermont Auvergne, a participé à cette étude. Il en délivre les premiers résultats : “Les premiers signaux traités ont révélé différentes catégories de séismes. Les scientifiques ont identifié une forme d’ondes assez spécifique à l’un de ces catégories, ponctuellement. Il s’agit d’une dizaine d’occurrences enregistrées depuis quelques années. Ces formes d’ondes sont caractéristiques de ce qui peut être observé sous certains volcans qui ont encore du magma en profondeur. Cette forme est typique de ce qu’on peut observer à Hawaï ou encore dans le Kamtchatka, en Russie, où se trouvent volcans actifs. Pour ces volcans, cette forme d’ondes est interprétée comme la présence de magma en profondeur, en train de dégazer”.
Du magma en profondeur
Cette étude conclut, à la lumière de la détection de ces formes d’ondes, que sous le Massif central, au sens Chaîne des puys-Monts Dore, on aurait encore du magma en profondeur au sein du manteau. Guillaume Boudoire définit la zone où se trouve le magma : “On a la profondeur des événements sismiques. On peut ainsi avoir une idée de la zone où se trouve le magma. On estime qu’il se trouve entre 25 et 35 km de profondeur. C’est une zone qui n’est pas anodine. On considère que dans notre département, la limite entre la croûte continentale et le manteau, se trouve environ à 25 km. On n’est donc pas très loin de cette limite”.
Une zone volcanique potentiellement active
Ces séismes longue période profonds sont localisés entre le puy de Dôme et le Pariou mais aussi au sud du lac Pavin. À l’intérieur du signal, ces séismes ne présentent pas de hautes fréquences. Cela signifie-t-il pour autant que les volcans du Massif central sont actifs ? Le scientifique répond : “Avec ces données, on ne peut pas tirer de conclusions définitives… On en reste à dire qu’il y a du magma en profondeur dans le manteau. Mais cela appelle quand même à une certaine vigilance de la part de tout le monde. On sait qu’on est dans une zone volcanique qui est considérée comme potentiellement active et pas éteinte. En revanche, avec les moyens actuels on ne sait pas quand on aura une éruption. Cela peut-être dans 10, dans 1000 ans ou dans 10 000 ans. On ne peut pas le savoir. À l’échelle des temps géologiques, ce serait une anomalie qu’il n’y ait pas à nouveau une éruption un jour en Auvergne”.
En effet, il y a eu une activité volcanique depuis des dizaines de millions d’années, avec des pauses. La Chaîne des puys a eu une activité soutenue puis des pauses de plusieurs milliers d’années. On n’a pas connu d’éruption depuis un peu moins de 7 000 ans. “Cette pause aura une fin un jour” prévient Guillaume Boudoire.
« Cela nous appelle à la vigilance »
Le scientifique du Laboratoire Magmas et Volcans évoque la portée de cette étude : “Il y a un aspect scientifique. On a la certitude qu’il y a encore du magma sous le Massif central. On s’en doutait un peu car dans cette zone, il y a un potentiel géothermique important, avec beaucoup de sources thermo-minérales. Mais pour la première fois, on a une preuve irréfutable sur un signal…”.
Dans l’imaginaire collectif, nous avons tendance à penser que les volcans d’Auvergne sont éteints. Or, si on regarde les classifications et les nomenclatures internationales, tous les signes montrent qu’ils sont potentiellement actifs. L’étude en anglais est accessible en ligne.
extrait et Source : https://france3-regions.franceinfo.fr
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