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La Terre n’a pas toujours été bleue

Il y a bien longtemps la Terre toute entière était recouverte de glace. Une période qui a quasiment effacé toutes traces géologiques des temps précédents.

La Terre est bleue comme une orange, disait le poète surréaliste Paul Eluard. Dans sa longue histoire, le bleu n’a pas toujours été sa couleur. Si un voyageur spatial s’était approché de notre planète il y a 700 millions d’années, il aurait sûrement consigné dans son carnet l’existence en troisième position du système solaire, d’une planète toute blanche, complètement gelée. Cette description est bien éloignée de ce que nous connaissons et pourtant, l’histoire de la Terre est émaillée de ces périodes de superglaciations. Selon une étude publiée dans les Comptes rendus de l’Académie américaine des sciences (PNAS), ces phases «boules de neige» (on parle en anglais de «Snowball Earth») sont responsables de la disparition d’une grande partie des couches sédimentaires de la planète. C’est toute une partie de l’Histoire du globe qui a ainsi été effacée.

Car pour comprendre le passé de notre planète, c’est bien sous nos pieds que les scientifiques vont regarder. La Terre est un livre dont les pages sont des couches de sédiments. Et plus on plonge en profondeur, plus on remonte dans le passé et moins les pages sont lisibles. «Les travaux de Brenhin Keller montrent qu’à une certaine époque, il y a près de 700 millions d’années, les pages du livre ont quasiment toutes disparu», explique Yves Godderis chercheur au GET, Géosciences Environnement Toulouse et directeur de recherche au CNRS. «Tous les sédiments accumulés sur les continents ont été arrachés par l’érosion des calottes de glace. Le niveau des mers lié à l’installation de ces calottes a repoussé les lignes de côte de 500 mètres. Les sédiments érodés ont ainsi été déversés directement sur le plancher de l’océan profond. Puis, entraînés par la tectonique des plaques, ils ont été détruits par le glissement des fonds océaniques sous les plaques continentales.» Une vaste remise à zéro de toutes les couches géologiques.

Le livre n’est toutefois pas totalement effacé et quelques morceaux de pages substituent par endroits. «Il reste quelques bribes qui peuvent nous donner une idée de l’histoire géologique avant cette période», continue Yves Godderis. «Les auteurs ne soutiennent d’ailleurs pas que le renouvellement a été total. Mais il y a bien une limite très claire qui marque un avant et un après. Cette limite est appelée Great Unconformity («la grande incohérence» en français).»

La Terre a été par trois fois entièrement recouverte de glace
Comment notre planète si agréable à vivre, de part sa position stratégique dans le Système solaire, ni trop près ni trop loin du Soleil, a-t-elle pu se transformer en enfer blanc, et ce à trois reprises? À chaque fois, les continents et les océans ont été recouverts pendant plusieurs millions d’années d’une épaisse couche de neige et de glace pouvant atteindre un kilomètre. Pour les deux périodes les plus récentes (il y a 635 et 720 millions d’années environ), la glaciation est à mettre sur le dos de la dislocation du supercontinent Rodinia. Le volcanisme qui en résulte libère de grandes quantités de basaltes qui sont très rapidement érodées par les océans naissants. Les grandes quantités de calcium ainsi dissoutes dans l’eau vont permettre de piéger le CO2 atmosphérique sous forme de carbonates, réduisant l’effet de serre. La température baisse alors de près de 50°C. Seule différence, il y a 635 millions la glaciation n’a pas été totale, ce qui explique que la grande incohérence se situe il y a prés 700 millions d’années.

Le premier épisode de glaciation totale est bien plus ancien. Il remonte à 2,4 milliards d’années. Il est sûrement la conséquence du développement des premières cyanobactéries qui émettent de l’oxygène. Le méthane alors présent dans l’atmosphère va alors avec cet oxygène pour se transformer en CO2. Or le CO2 est un gaz à effet de serre bien moins puissant que le méthane, ce qui conduit à une chute drastique des températures.

Des pages arrachées qui laissent planer un grand mystère
«Les superglaciations sont très visibles dans la roche car on retrouve une couche très épaisse de carbonates de calcium de plusieurs mètres d’épaisseur peu partout sur le globe», explique Yves Godderis. «Le carbonate en lui-même n’est pas une trace directe de la glaciation, mais du passage entre un monde très froid qui se réchauffe très vite.» Car la Terre, même couverte de glace, maintient une certaine activité volcanique ; ainsi, pendant les millions d’années que dure une glaciation totale, le CO2 issu du volcanisme s’accumule dans l’atmosphère sans parvenir à se dissoudre dans les océans. Cela génère un effet de serre très intense qui finit par faire fondre les glaces, la température passant de -40°C/-30°C à 40°C/50° C. Les roches subissent alors un phénomène d’érosion accélérée, ce qui libère de grandes quantités de calcium dans les océans. Celui-ci peut alors se lier au CO2 pour le piéger sous forme de carbonate qui s’accumule très rapidement dans les fonds océaniques.

source : http://www.lefigaro.fr/

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