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Du coton pour irriguer le désert

Le désert se caractérise essentiellement par l’absence de pluie. Pour autant, l’air n’y est pas toujours très sec. Le problème réside dans la captation de l’humidité, de l’eau contenue dans l’air, même lorsqu’elle devient visible sous forme de brouillard ou de rosée. Comment attraper ces fines gouttelettes du matin avant que la brûlure du soleil ne les fasse disparaître de la surface du sol ?


Un chercheur français s’est passionné depuis plus de 10 ans pour la récupération de la rosée.  Daniel Beysens, physicien de l’ESPCI, a créé l’association Opur qui milite pour l’installation de condenseurs de rosée dans les endroits privés de puits. Mais voici qu’une autre solution est proposée par des chercheurs de l’université de Eindhoven associés à une équipe de l’université polytechnique de Hong Kong PolyU). Ensemble, ils ont mis au point un nouveau matériau à base de… coton.

Oui du simple coton. Comme nous l’appelons souvent y prêter attention, du coton hydrophile… C’est à dire qui aime l’eau. Et qui l’absorbe. Installé dans un milieu désertique, il peut donc se gorger de l’eau capturée dans l’atmosphère, dans la brume, la rosée. Très bien. Mais deux problèmes se posent alors : quelle quantité d’eau une certaine masse de coton peut-elle absorber ? Et comment récupérer cette eau prisonnière des fibres de la ouate ?

Ce sont les réponses à ces deux questions que les chercheurs s’apprêtent à publier dans la revue Advanced Material de février 2013. En fait, avec leurs collègues de Hong Kong, ils ont créé un nouveau matériau aux propriétés remarquables. Pour cela, ils ont imprégné les fibres de coton avec un polymère, le PNIPPAAm, qui n’est autre que du Poly(N-isopropylacrylamide). Il s’agit d’un hydrogel (un gel qui aime l’eau) dont la caractéristique est de changer de phase à la température très précise de 34°C. Cette modification physique engendre un comportement radicalement inversé. Hydrophile en dessous de 34°C, le NIPPAAm devient hydrophobe au dessus.

Lorsque le polymère imprègne les fibres de coton, les photos ci-dessus montrent la modification spectaculaire de la structure du matériau résultant. A gauche, toutes alvéoles ouvertes il peut absorber de l’eau. A droite, plus de place pour le liquide. L’association avec le polymère transforme complètement le comportement du coton mais aussi sa capacité d’absorption. Cette dernière passe de 18% de son poids en eau, à l’état pur, à 340% lorsqu’il est imprégné. Autrement dit, 1 kg de coton non traité peut contenir 180 grammes d’eau (0,18 l). Il en contient, après traitement, 3,4 kg, soit 3,4 litres…

desert

Nous voici donc en présence d’une véritable pompe à vapeur d’eau. D’autant que le processus est réversible. Lorsque la température redescend en dessous de 34°C, le coton-polymère redevient hydrophile. Le processus, presque magique tant il est adapté aux usages possibles, ouvre de vastes perspectives. En particulier pour l’agriculture. Imaginez des rigoles d’irrigation dont les bords seraient tapissés de ce coton-polymère.

Arrosage automatique

La nuit, dans le désert encore plus qu’ailleurs, la température chute brutalement. Elle descend largement en dessous de 34°C et met le matériau en position hydrophile. Au matin, moment le plus humide, les bordures blanches se gorgent de l’eau captée dans l’atmosphère. Lorsque le soleil monte et que la température dépasse 34°C, l’eau capturée est relâchée dans la rigole… Mais rien ne l’empêche, alors de s’évaporer, remarquerez-vous ! Exact… Au lieu d’une irrigation par des rigoles d’eau courante, mieux vaudrait sans doute placer le matériau au plus près des plantes cultivées.

La beauté du système réside également dans son fonctionnement automatique. Pas de travail mécanique à effectuer pour le faire fonctionner. Pas de source d’énergie à installer, comme avec les pompes d’irrigation…. Le procédé n’utilise que ce qui est présent dans la nature : le soleil et l’humidité de l’air. Difficile de faire plus écologique. Sauf si la production du polymère se révélait très polluante ou coûteuse. Ce que les chercheurs ne précisent pas, à ce stade.

Vêtements de sport

La température de transition de phase de 34°C, qu’il est peut-être possible d’ajuster, peut aussi donner des idées aux fabricants de vêtements de sport. Déjà, le coton tout seul peut servir au refroidissement du corps. Il suffit de le mouiller pour profiter du froid (chaleur latente de vaporisation) engendré par l’évaporation de l’eau. Avec ce nouveau matériau, l’eau resterait prisonnière du tissu jusqu’à… ce que la température du corps le chauffe à 34°C. C’est alors seulement qu’il relâcherait sa cargaison d’eau réfrigérante. Au moment où l’athlète serait en plein effort…

source : http://blog.slate.fr

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